Marie dans la « Comédie » de Dante
Cécile Le Lay, Marie dans la Comédie de Dante. Fonctions d’un « personnage » féminin, Rome, Aracne, 2016, 449 p. 30€
Dante Alighieri écrit sa Comédie à une époque où la dévotion mariale est devenue une pratique quotidienne, et il ne manque pas d’évoquer la sienne. Plusieurs études célèbres ont révélé la richesse théologique et littéraire des principaux passages où apparaît la Vierge Marie, notamment la prière finale. Pourtant, aucun spécialiste n’a encore cherché à analyser les différentes modalités d’intervention de cette figure féminine dans l’ensemble du récit. C’est ce qu’examine cet ouvrage, en adaptant et en combinant les approches historico-critique, narratologique et poétique.
Marie est étudiée en identifiant et en examinant les différentes fonctions qui lui sont attribuées au long du récit (selon un « schéma actantiel » élargi) : fonctions juridico-théologique et morale qui correspondent à une « présence » considérée comme « adjuvante », fonction liturgique pour une « présence invoquée », et fonction esthétique pour une « présence admirée ». La prière finale est envisagée comme une synthèse de toutes ces fonctions. Enfin, un dernier chapitre est consacré à Béatrice pour souligner sa mise en valeur aux côtés de la « Reine du ciel ».
Sergio Cristaldi écrit, à la fin de sa préface:
Si, dans la Comédie, Marie est constamment une présence personnelle, jamais réduite à un principe abstrait — et Cécile Le Lay le souligne de manière opportune avec les mots de Teilhard de Chardin et d’Henri de Lubac –, cette présence est qualifiée par son intensité affective, qui suscite chez le protagoniste une réponse sur la même longueur d’onde. L’aspect hiératique de la Vierge Marie à la fin de Paradis XXXIII — où aucune parole ne lui est attribuée — n’enlève pas cette connotation fondamentale. Le dernier plan de Marie, ce détail des yeux qui se détachent de Bernard pour se tourner vers le haut, vers Dieu, confirme le fort coefficient lyrique qui agit dans le passage narratif : comme la dame des rimes stilnovistes, la Vierge Marie s’exprime et intervient fondamentalement par son regard, d’où rayonnent à la fois une essence et une opération.